Les sous-genres du rock des 90's - Episode 3 - Le grunge
À la fin des années 80 dans le nord-ouest des États-Unis, à Seattle plus précisément, un tout nouveau courant aussi fulgurant qu'éphémère prend vie. Personne ne se doute alors du raz-de-marée que deviendra le grunge.
Avant d'être musical, le grunge est une éthique de vie, une philosophie. Courant attitré de la génération X (alors définie comme pessimiste et apathique), il réfute les codes sociaux de l'époque ainsi que la société consumériste. Proche de l'éthique « do it yourself » du punk, le grunge se veut également « anti-mode ». En témoignent ses codes vestimentaires, inspirés des tenues des ouvriers de Seattle : cheveux longs et gras, chemises en flanelle, jeans déchirés, pulls décousus et baskets usagées.
Musicalement, le « contre-courant » est également de mise. Ses deux plus grosses influences sont le punk-rock/hardcore (Black Flag, The Melvins) et le hard-rock/heavy metal (Led Zeppelin, Black Sabbath), mais aussi le rock indépendant et le blues rock. Alternatif même dans les accordages de guitares (drop D, open E), le grunge reste dans l'ère de son temps et utilise beaucoup de pédales d'effets (distortion, larsen, fuzz, wah) pour obtenir un son massif et « boueux ». Bien que certains groupes mettent un accent particulier sur leurs influences propres (punk hardcore pour Nirvana, métal pour Alice in Chains ou encore hard rock pour Pearl Jam), les structures des compositions restent souvent communes entre les différents groupes : couplets calmes et refrains puissants. Kurt Cobain citera même l'influence de l'album "Surfer Rosa" des Pixies comme déterminante pour l'écriture de ses morceaux.
Comme une rupture totale avec les années 80 et leurs « guitar-hero », le grunge avait ses propres antihéros de la guitare. En effet, le genre est souvent décrié pour son absence de solos de guitares, phénomène quasi incontournable dans la musique rock et métal des années 80. Pour Jerry Cantrell d'Alice in Chains, les solos doivent « servir la chanson et non être un prétexte pour montrer la maîtrise technique du guitariste ». Pour Butch Vig, producteur génial qui a été aux commandes sur l'album "Nevermind" de Nirvana, c'est cet album qui aurait tué les solos de guitare.
Côté paroles, on retrouve aussi un élément qui participe purement à l'esthétique grunge : on parle (beaucoup) d'héroïne, d'angoisses, de dépression, ou encore de suicide (Nirvana, "I hate myself and I want to die"), joyeux tout ça... Pendant la première moitié des années 90, le monde entier se fait submerger par le grunge, porté par des groupes qu'on ne tardera pas à désigner comme le « Big 4 of Seattle » : Nirvana, Alice in Chains, Soundgarden et Pearl Jam. D'autres villes américaines eurent aussi le droit à leurs représentants : San Diego avec les Stone Temple Pilots ou encore Chicago avec les Smashing Pumpkins.
Ordinairement sous-représentées dans le rock, des groupes et artistes féminins ont aussi joué un rôle très important dans le grunge. Étroitement liées au courant féministe et punk riot grrrl, on peut noter l'influence notable de groupes comme Hole, L7, ou encore Bikini Kill (dont la chanteuse et bassiste Kathleen Hanna, qui a suggéré le titre de la chanson "Smells Like Teen Spirit" à Kurt Cobain). D'autres artistes marquantes ont aussi fait partie des groupes les plus importants de l'époque (D'Arcy Wretzky, The Smashing Pumpkins).
Bikini Kill
La mort par suicide (ou pas...) de Kurt Cobain en 1994 marquera le déclin du grunge. En tant qu'icône planétaire, la fin de Nirvana entraînera celle de l'intérêt du grunge et laissera plus tard place à de nouveaux groupes de « post-grunge » : Foo Fighters, Seether, Creed ou encore Nickelback.