Afrique Victime, nouvel opus de Mdou Moctar alias le Jimi Hendrix du Sahara
Avec Afrique Victime, le chanteur et guitariste touareg, Mdou Moctar, réalise un tour de force politique et musical. Mélangeant la tradition, l'autotune et la guitare électrique, l'artiste nigérien offre un véritable cri du cœur contre l'impérialisme d'hier et d'aujourd'hui.
Enregistré devant un public dans un village nigérien, le sixième opus de Mdou Moctar embarque l’auditoire dans une épopée musicale. On passe ainsi du blues touareg, popularisé par Tinariwen, formation originaire de Tessalit entre l’Algérie et le Mali, au folk rock puis au rock psychédélique.
Ce feu d’artifice sonore n’est toutefois pas dénué de sens. Via des textes engagés et chantés en tamashek, français et anglais, Mdou Moctar et son groupe composé du bassiste Mikey Coltun, du batteur Souleymane Ibrahim et du guitariste rythmique Ahmoudou Madassane revendiquent l’émancipation de l’Afrique Subsaharienne et la libération des peuples du joug colonialiste.
Le titre éponyme est d’ailleurs un brillant mix de toutes ses influences et constitue une détonation rock comme on en écoute trop peu ces temps-ci. On trouve ici des artistes totalement sûrs d’eux-mêmes, roulant à fond la caisse dans les pas Jimi Hendrix, Stu Mackenzie ou encore John Dwyer. Tout cela donnant un hymne anti-impérialiste endiablé de 7 minutes 26.
Le reste de l'album oscille entre les riffs groovy et les paroles intimistes, tour à tour nous incitant à devenir de meilleures personnes en mettant la jalousie et les pensées noires de côté comme dans Chismiten tandis que d’autres morceaux comme Taliat et Bismillah Atagah parleront davantage aux cœurs brisés.
La structure des chansons respire également la liberté et n'enferme jamais l’album dans une case ou un genre précis. Mdou Moctar avoue lui-même “ne pas savoir ce qu’est exactement le rock”, une façon de s’affranchir des barrières et de proposer une musique totalement décomplexée, à la fois entraînante et aux messages forts.
Sur ce dernier point, Mdou Moctar réussit d’ailleurs l’exploit de ne jamais tomber dans l’agressivité et le procès des puissances étrangères. Au contraire, le message se veut ici optimiste et plein d’espoir, l’artiste utilisant les chansons d’amours pour mettre au ban l’inquiétude et les divisions qui gangrènent ce continent meurtri. Une parfaite façon de regarder l’avenir avec sérénité et de préparer l’été en dansant sur les riffs hypnotiques de ce Jimi Hendrix du désert.