Derrière la moustache de Brassens
Le nom de Georges Brassens évoque bien des choses. Cet immense artiste évoque à mon cœur un bonheur immense. Celui qui se trouve dans un chausson aux pommes encore brûlant, dans la main de cet homme impressionnant mais auprès duquel vous savez être protégé le reste de votre vie, dans le regard de celui que vous appelez : « papa ». Retour sur l’humanité moustachue d’un auteur qui a marqué autant la musique, que vos souvenirs, que mon âme d’enfant.
Truman Show
La musique de Georges Brassens incarne une vie particulière dans laquelle la poésie côtoie le réel sans barrière et sans autre intention que de faire rêver. Les mots qu’il choisit appellent à se concentrer sur ce qui se déroule devant soi et à en voir toute la beauté.
Un marché populaire, un orage, un banc public, une passante, un enterrement construisent notre quotidien. L’auteur des copains d’abord propose de voir les hommes derrière le show. Il voit au-delà des apparences. Il trouve le merveilleux pour le chanter ! L’humanité de ces moments, de ces lieux, de ces objets ou situations donnent sens au fait qu’on mette le pied au sol le matin.
Mais ce qui fait de Brassens un auteur encore écouté, quasiment un demi-siècle après sa mort, c’est l’évidence de ce qu’il décrit dans ses chansons. La vie qu’on y entend c’est la vôtre. Celle composée d’amour, d’amitié, de rêves, de tristesse et de tout ce qui vous identifie. C’est le quotidien dans son rythme le plus banal autour d’une bière le vendredi soir ou d’un dimanche en famille. Et le « brave » Georges vous apprend à ne pas craindre cet état ; car la banalité ne rime pas avec l’arrêt.
La vie comme une poésie :
Parler de Georges Brassens m’a value quelques chambrages de mes amis. Car malgré la bienveillance sincère de ceux qui m’entourent, on ne peut le nier : c’est « ringard » aux yeux de beaucoup de gens. Pourtant, il est tout aussi vrai que cet artiste incarne une poésie populaire à l’image de Mc Solaar, Iam ou Orelsan dans un autre style de langage et de musique.
Sa moustache et sa guitare se sont construit chez Jeanne, dans la grotte d’une impasse de Paris. Ils ont appris à composer dans la bibliothèque du quartier, à jouer au piano par ses propres moyens, et à écrire en lisant les poètes classiques comme Rimbaud, Verlaine ou Hugo. Isolé dans son monde et ses idées, cet ours mal léché quitte cependant volontiers ses animaux pour vivre avec vous. Il parcourt le monde en passant dans chaque endroit où se trouve quelqu’un et en fait une poésie. Il aime le quotidien populaire, sincère, vrai et chantant. Dans sa discographie, comme dans son cœur, se trouve une chose vitale : les autres.
Feuille buvard
Le Sétois a une façon tellement unique de retranscrire le monde. Il met en mot l’amour d’un homme envers sa femme avec humour et tant de grâce avec Je me suis fait tout petit. Il critique la société et ses changements qu’il juge débilitant, pour ne pas dire animalisant, dans Le pornographe avec un sarcasme si sérieux. Tant de belles choses habitent la poésie de Brassens. Sa manière d’agencer les mots vous fait redécouvrir la langue de Molière.
Un titre, plus que les autres, ressort de sa discographie : La non demande en mariage. Il y chante l’amour impossible dans une lettre dont chaque mot vous broie le cœur. L’artiste met en lumière toute son humanité : forte, fragile, amoureuse, heureuse, triste. Voilà pourquoi vous êtes autant percuté par Brassens. Dans ces paroles, c’est votre vie que vous entendez. Vous absorbez chaque son comme une feuille buvard pour revivre ses souvenirs qui vous ont construit et font de vous un être humain.
Ce bonhomme était un grand homme parce qu’il a su mettre en chanson nos cœurs et nos âmes. Aujourd’hui les mots de papi Georges semblent avoir une résonance plus puissante encore, lorsque la société n’a plus le droit de s’approcher à moins d’un mètre.