Comment Amy Winehouse est devenue culte en seulement deux albums ?
La semaine dernière on fêtait les 17 ans de Frank, premier album d'Amy Winehouse. Aujourd'hui c'est au tour de Back To Black - le deuxième et dernier album - de souffler ses 14 bougies. On a choisi ce double anniversaire comme occasion pour vous parler d'elle. Parce qu'on n’en parlera jamais assez.
Du haut de ses 20 ans, l'artiste nous offrait la découverte de sa voix éthérée par laquelle l'émotion se transmet avec une facilité déroutante. On avait l'impression de rencontrer une nouvelle artiste tout droit venue des studios Motown ; comme eux, elle savait nous parler de douleur en nous faisant du bien. Amy Winehouse était une chanteuse plutôt précoce ; elle reçoit sa première guitare à l'âge de 14 ans et apprend seule, en cachette. Elle commence à composer ses propres chansons l'année d'après. Elle n'est pas précoce seulement musicalement, à 13 ans elle est d'ors-et-déjà sous antidépresseurs.
À la sortie de son premier album, elle accède rapidement aux nominations des BritAwards. En revanche, il faudra attendre l’indétrônable Back To Black afin que la chanteuse soit propulsée au rang de meilleure artiste féminine en 2007. En seulement une décennie, Amy Winehouse devenait alors une artiste culte.
Le titre de l'album Frank, c'est un hommage à Frank Sinatra ; le chanteur de prédilection de son père. Ce clin d’œil dévoile rapidement la tonalité de l'opus ; une œuvre principalement jazzy imposant les frissons dès l'écoute de Stronger Than Me.
Par ailleurs, lorsqu'Amy rencontre son producteur pour la première fois, il raconte la voir arriver au studio habillée d'un jean sur lequel il est écrit « Sinatra is god » avec un marqueur noir au niveau des fesses. Caractéristique de ce personnage haut en couleur. Car oui, Amy Winehouse n'était pas n'importe quelle artiste. Or, plus le temps passe et plus Frank laisse l'artiste sceptique face à ses compositions. C'est le résultat de différentes co-écritures qui rendent cet album quasi impersonnel.
« Je l'écoute différemment maintenant. J'en suis toujours très fière, je pense encore que c'est un grand album. Mais, avec le recul, il y a certaines choses que j'aurais faites différemment... Mais ce n'est pas parce que je voudrais faire les choses un peu différemment aujourd'hui que cela signifie que je n'aime pas ce qui se trouve sur cet album. »
C'est aussi le résultat d'une frustration face à une de ses volontés : elle voulait être une artiste accessible. C'est pour cela qu'elle a laissé de côté le jazz par la suite – tout en l'intégrant de manière subtile à ses compositions-. "Les morceaux de Back to Black sont plus accessibles que ceux qui figurent sur Frank, le jazz étant assez élitiste. Les gens ne l'avaient pas vraiment saisi et apprécié". C'est ce qui peut, en complément de son indéniable acharnement au travail, nous impressionner davantage.
En 2006, son deuxième album voit le jour. Il s'est aujourd'hui vendu à plus de 16 millions d'exemplaires dans le monde entier. C'est à peu près à ce moment-là, en écoutant cet album, qu'on réalise qu'on ne peut dire jusqu'où s'étend le talent de l'artiste.
Back To Black, c'est l'album du bouleversement personnel, celui de la rupture avec Blake Fielder- Civil, son ex-compagnon de l'époque. C'est un travail si intime qu'on comprend pourquoi personne n'a pu rester de marbre. Finalement, ce qui aurait pu avoir fonction de catharsis la renvoyait constamment à sa peine et la plongeait petit à petit dans un gouffre sans fond.
Amy Winehouse était une femme en proie à la dépendance ; aux drogues mais aussi à l'affection des deux hommes qu'elle aura adoré au point de leur permettre de la détruire. L'intérêt écœurant des médias pour ce qu'on appelle « une descente aux enfers » aura participé à son ascension comme à sa destruction. Prenant en compte que son mari n'est pas entré seul dans sa vie et qu'il a apporté avec lui ses compagnons de toujours qu'on ne présente plus, nous comprenons rapidement les raisons de sa mort en juillet 2011. C'est tout cela qui nous fera dire, à chaque nouvelle écoute de ses morceaux « Merde. Qu'est-ce qu'elle aurait pu nous chanter encore ? ».